Une p'tite pièce pour le Silure ?

Sa main perfora le fer de mon armure aussi facilement que le caillou coule dans l'eau. Bien qu'il m'atteignit à l'épaule, la violence du coup me coupa le souffle alors que j'étais projeté vers l'arrière.
Mon crâne heurta heurta le piler de marbre noir sur lequel je m'étais si souvent adossé. Et lentement, je m'affaissai, sans défense.
Mes lèvres s'entrouvrirent, alors que j'avais l'impression de suffoquer dans mon armure.
Je m'entendis prononcer, peu distinctement, les mots «Dame Makiavel», tandis que ma vision se brouillait peu à peu, au même titre que mes pensées.
Et alors que ses lèvres couvertes de sang emplissaient mon esprit encore et encore, je sentis mon esprit dériver vers l'inconscience.
…
Une puissante gifle me ramena à moi. Une gifle ? On m'avait donc retiré mon casque.
Ma vision était encore trop brouillée pour que je distingue quoi que ce soit. Je sentais parfaitement les gouttes de sueur perler sur mes tempes, le bras puissant qui me soulevait de terre. Mes cheveux qui me caressaient le front.
Mes paupières s'entrouvrirent avec difficulté, et Dame Clio Makiavel m'apparut, bien qu'un peu floue, je distinguais aisément ses traits.
Un mauvais rêve ? Oui, ça devait être ça.
Dame Makiavel était aussi resplendissante et frêle que d'habitude. Jamais elle n'aurait pu commettre le massacre que je discernais peu à peu devant moi.
Tous...morts.
Ma respiration se fit plus haletante à mesure que je prenais conscience de l'horrible réalité. Et mes bras qui refusaient de bouger. Je sentais le sang couler en torrent le long de mon bras gauche.
Et ses yeux. Ses yeux noirs comme le fond de l'enfer qui me fixaient intensément, comme un humain regarde un rat.
Alors je les vis, ses canines démesurées, luisantes comme un éclair dans la nuit.
Comme un vampire regarde un homme.
Je poussai un cri qui déchira le silence alors qu'elle les enfonçai dans ma nuque avec une sauvagerie bestiale.


C'est avec un hurlement que je me réveillai. Haletant, je palpais mon front maculé de sueur. Encore ce même cauchemar. Nuit après nuit, il me hante comme un spectre déterminé à me détruire.
J'ai les jambes en coton chaque fois que je me réveille. Dans cette ruelle sale et puante, là ou s'entassent tous les ramassis de la société.
Un endroit pour miséreux, exilés, trop pauvres pour se permettre une existence décente. Beaucoup meurent de faim, ici. De froid, de violences, de maladie.
Personne ne vient s'occuper de nous.
C'est dans ce but que je suis là, d'ailleurs.
La faim, le froid ou la maladie ne me tueront pas. Quant à la violence, hé ! Plus personne n'a essayé depuis un bail.
La soif de sang me nouait les tripes depuis presque trois jours. Boire de l'eau me permet de la tenir en respect un peu plus de temps, sans grand effet majeur, malheureusement.
A vue d'œil, il était encore tôt, probablement vers les six heures du matin.
Et c'est avec difficulté que je me levai, encore barbouillé, des images de morts et de cadavres empilés emplissant mon esprit torturé.
J'avais besoin de m'évader un peu. Rester assis tous les jours dans la poussière et la crasse comme ces vieillards décatis
me fait perdre la raison peu à peu.
Ceignant Joyeuse à mon flanc gauche, je m'étirai sans un bruit, dans le petit matin encore brumeux, sans un mot. Certains sont pointilleux sur le tapage nocturne et n'aiment pas être réveillés.
Joyeuse est ma seule compagne depuis toutes ces années. La seule que je n'ai pas tuée. Elle est un peu ma seule famille, même si elle ne remplacera jamais ma vraie famille.
Celle d'avant.
L'homme à besoin de compagnie. Et quand il n'en a pas, même une rapière fait l'affaire. Les vampires ne font pas exception à cette règle.
Le plus discrètement possible, je glissai aux cotés d'un mendiant deux pièces d'argent.
Chassant avec plus ou moins de succès toute pensée vaine de mon esprit, je commençai à marcher en titubant légèrement, comme poussé par une brise invisible.
Je ne pourrai pas réprimer ma soif de sang encore longtemps, et bientôt, il faudrait que je parte en quête d'une victime, innocente.
La mort est un moindre mal comparée à ma condition...

Après le froid et l’obscurité de la nuit, l’aube déposait délicatement ses larmes de rosée sur les fleurs comme se libérer de ses peurs nocturnes. La rosée scintillait de milliers d’étoiles aux reflets du soleil levant et bientôt elle s’évapore vers le ciel emportant avec elle tout les souvenirs de la nuit…

Des bruits de pas, des chuchotements, et même des ronflements, tels étaient les (étranges) bruits qui résonnaient dans les étroites rues du Quartier Pauvre.

Veyne ne manqua pas de se faire remarquer dans ce décor de misère. Les regards étaient constamment braqués sur lui, cherchant la moindre forme évoquant un porte monnaie enfoui sous sa longue veste rouge.

Ne prenant pas compte de ce qui se passait autour de lui, Veyne marchait en direction de la sortie la plus proche. Sa destination étant la sortie de la capitale, il n’avait pas de temps à perdre dans un endroit pareil.

Alors qu’il se rapprochait de sa destination, Veyne croisa une personne bien particulière. Ses vêtements, comme ceux de toutes les autres personnes habitant au Quartier pauvre, étaient usés par le temps. Il ne se démarquait pas particulièrement des autres de par son apparence Physique, mais pourtant, celui-ci était le premier à ne pas avoir suivi Veyne du regard…

Voilà quelques pièces, mendiant. Lui dit-il tout en lui présentant une bourse en cuir, semblant contenir bien plus que quelques pièces d’or… Le mendiant hésita un instant, il alla même jusqu’à tiquer légèrement à l’entente de son surnom. Mais au final, il finit par tendre le bras, puis saisit aussi tôt l’argent.

Il le remercia d’une voix basse, puis continua sa route au même train que tout à l’heure. Après l'avoir dépassé de plusieurs pas déjà, Veyne remarqua qu'une rapière était fixée à son flan gauche. Une rapière d'ailleurs bien trop belle pour pouvoir être en la possession d'un homme aussi pauvre.

Il n'hésita pas à le rappeler, d’un ton mesuré mais quelque peu strict.

Cette… Avez-vous eu un problème en cours de route ?

C’est alors que le jeune homme arrêta sa marche...

L'argent ne m'est pas vraiment utile, mais c'est avec plaisir que j'acceptai l'argent de cet homme à l'allure étrange. Bien portant, bien vêtu, sa place n'était pas ici.
Je ne suis pas un mendiant, et je ne compte pas sur la charité des autres pour survivre. C'est volontairement que je me suis exilé ici. Au poids, en supposant que c'était des pièces d'or, il y en avait bien trop pour moi.
Je passerai une nuit au chaud ce soir, au moins. Quant au reste, certains dans cette ruelle en feront sûrement meilleur usage que moi.
Est-ce par gentillesse, par pitié, ou pour simplement se sentir supérieurs que les hommes riches donnent aux pauvres ? Pas de réponse possible.
Je me dirigeai vers la fontaine pour y étancher ma petite soif quand cet homme m'interpella, d'un ton qui ne me plut pas vraiment, mais qu'importe.
C'est avec un regard incompréhensif que je braquai mes yeux sur lui, avant de comprendre qu'il me parlait de Joyeuse.
Effectivement, il est assez rare de croiser un mendiant avec une arme aussi noble et ancienne que la mienne.
Les épées comme Joyeuses n'ont plus été forgées depuis au moins un siècle. Ce jeune homme n'avait pas l'air d'être un connaisseur expert, mais mieux valait être prudent.
Désirait-il m'acheter Joyeuse ?
Car je remarquai moi aussi une garde ouvragée dépassant de son dos.
Un problème en cours de route, hein ?
Je suppose que l'on peut dire ça, oui. La longue route que fut ma vie ne fut qu'une succession de problèmes plus graves les uns que les autres.

-En quelque sorte, mon noble sire, lui répondis-je d'un air las en m'inclinant légèrement.

Divulguer mon histoire ne m'intéresse pas, et je ne pense pas qu'il s'y intéressait non plus. Ainsi, poussé par je ne sais quel sentiment, peut-être l'envie de parler, simplement, je retirai Joyeuse de son fourreau, lui en faisant admirer la lame parfaitement aiguisée.
La pâle lumière de la mourante lune se reflétant sur une arme est toujours un spectacle impressionnant, à mon sentiment.
Je jetai Joyeuse en l'air et la rattrapai par l'extrême pointe avec le pouce et l'index, présentant la grade à cet inconnu qui avait l'air de s'y connaître, ce qui n'était pas pour me déplaire.
La possibilité qu'il s'agisse d'un chasseur de vampire n'était pas à exclure, mais de voir qu'un homme s'intéressait à Joyeuse me faisait visiblement abandonner toute prudence.
Et puis, un vampire, même désarmé, ne l'est jamais totalement...
Comme un père faisant admirer son enfant à la foule, j'incitais d'un mouvement de tête ce jeune homme à saisir Joyeuse.

Ok, Veyne s’intéressait à cette rapière, mais ce n’est pas pour autant qu’il échangerait son épée contre elle, contrairement à ce qu’on pouvait croire en le voyant l’agiter dans tous les sens. Elle était extrêmement souple, ce qui rendait sa maniabilité encore meilleure. Sa garde était relativement haute, donnant une sensation de protection à son porteur. Finement travaillée, l’épée n’affichait aucun défaut grossier, c’était un modèle parfait symétrie. Elle dépassait en tout point l’épée de Veyne.

Sa valeur ? Deux cent pièces minimum, un prix donc hors de la portée de Veyne. La tenir dans ses mains était déjà un privilège. Après quelques secondes d’admiration, Veyne la rendit à son maître tout en affichant un sourire amical.

Pour sa part, il ne sortit heureusement pas Oversoul de son fourreau. L’épée était très vieille, et particulièrement moche. Veyne soupçonnait même que la lame approchait de sa dernière heure, c’est certainement pour cela qu’il l’utilisait de moins en moins.

Le mendiant n’avait pas vraiment l’air de vouloir parler de ses problèmes. C’était bien dommage, Veyne était plutôt curieux de savoir ce qu’il lui était arrivé pour en être là. Mais bon, Sinistra le comprenait très bien, lui aussi n’aimait pas parler de sa vie à n’importe qui.
C’est alors qu’il décida de faire plus ample connaissance.

Veyne, du clan Sinistra, je n’ai pas d’emploi fixe, je vis au jour le jour.

Lui dit-il d’un air dynamique. Il avait beau être le disciple de l’ancien roi de la terreur, sa nature gentille n’en changea pas. Il aimait bien faire de nouvelles rencontres, principalement lorsque les personnes sont intéressantes, comme celle-ci. En plus de cela, son corps semblait travaillé à la perfection, et ça se voyait même s’il portait des vêtements, cela donnait la nette impression qu’il était bon en combat direct. Peut être Veyne s’en ferait-il un allié ? Pas si sûr.

A qui ai-je l’honneur… ? Ajouta-t-il à sa dernière phrase, toujours l’air si détendu.

C'est avec un mélange de fierté et de satisfaction que je voyais cet homme faire danser Joyeuse de son habile main. J'entendais sa fine lame fendre l'air comme un fredonnement, et la douce musique coulait en mon être comme un doux nectar.
Voilà des années que Joyeuse et moi ne nous étions pas donnés en spectacle, à bien y repenser...
En cet instant, voir cet homme manier Joyeuse me donnait envie de danser avec elle, et c'est avec un plaisir sans fin que je la rangeai dans son fourreau, caressant au passage sa file lame d'acier trempé sur lequel j'avais si souvent passé mes doigts.

On m'appelle Silure, lui répondis-je en m'assoyant en tailleur à même le sol, contre le mur craquelé d'une maison de pierre.

C'est démoralisant de penser que certaines bâtisses sont aussi vieilles que moi. Je poussai un soupir en invitant cet individu à s'asseoir à mes cotés. Difficile de penser qu'un individu aussi bien vêtu et se permettant de donner une telle somme d'argent vivait au jour le jour.
Jusqu'à aujourd'hui, jamais le nom de Sinistra n'était parvenu à mes oreilles. Il faut dire que la ruelle qui compose une bonne partie de mon monde n'est guère concernée par ce qui se passe « au-dehors ».
Quel genre d'emploi pouvait-il bien avoir ? Sa dégaine, sa façon de parler ne rappelaient pas celles d'un assassin. Mercenaire. Garde du corps, à la limite. Un combattant, à n'en pas douter vu les courbes musculeuses que l'on devinait aisément sous ses amples vêtements.
La vie est bien cruelle au point de forcer les enfants à prendre les armes avant même leurs vingt printemps. Étais-je aussi jeune lors de mon enrôlement dans l'armée ?
Son ton avait changé. Voilà qu'il ne me prenait plus pour un simple mendiant, dirait-on. Joyeuse semblait lui inspirer plus de courtoisie à mon égard que moi-même.
Compréhensible, vu mon allure.
Je glissai la bourse de cuir précédemment reçue sous ma tunique pour ne pas éveiller de regards envieux dans mon entourage.
Les vampires sont haïs et chassés dans tout le Misanris, décris comme d'abjects tueurs avides de sang et de carnages. Notre réputation nous précède, mais pour ceux, comme moi, qui répugnent à tuer, ceci nous contrait au silence et à l'exil.
Son accent différait de celui de la région. Je lui en fit part, pour alimenter la conversation. Peut-être avait-il voyagé.

-D'où venez-vous ? Me permis-je d'ajouter discrètement.

Écouter un récit de voyage est toujours un plaisir pour mes oreilles habituées aux gémissements de douleur, aux plaintes et autres sons peu agréables. J'espérai qu'il m'en ferait part. Malgré son jeune âge, une lueur dans ses pupilles violacées lui conférait comme une touche de maturité agréable à admirer.

Silure, hein ? Cet individu n’était apparemment pas de la région, à moins que ce ne soit qu’un surnom. Il s’assit au sol, tout en s’adossant contre le mûr d’une bâtisse délabrée. Et suite à cela, il demanda une information que même Veyne ignorait…

Veyne n’avait effectivement aucune idée de ses origines. Il était certes issu du Clan Sinistra, mais il n’en gardait malheureusement aucun souvenir. Les dossiers qu’il consulta aux côtés de Kyomu ne contenaient que quelques informations basiques au sujet de sa famille.

Et pour couronner le tout, Veyne ne s’était jamais posé cette question. D’où venait-il ? Semi-Elfe, donc sûrement d’Alféa, mais né avec le don des ténèbres, la forêt des ombres peut être ? Dans ce cas là, d’où tenait-il sa maîtrise du métal… ?

Je suis originaire des Montagnes d’Elyawood. Répondit-il hâtivement, comme pour se sortir d’une situation gênante.

Après seulement quelques secondes, Veyne se reprit en main, et afficha un sourire rassurant. Il s’adossa en suite contre le mûr sur lequel reposait Silure, et reprit sa phrase précédente d’un ton calme et chaleureux.

Je me permis de quitter ma famille à l’âge de six ans, afin de trouver certaines réponses à mes questions d’enfant. Suite à cela, ma destination primaire fut la capitale, où je fis la rencontre de mon unique tuteur, Kyomu. Ensemble, nous fîmes le tour du continent, avant que mon maître ne perde la vie. Je parle toutes les langues vivantes du royaume, bien que mon accent Trollesque soit catastrophique.

Conscient du fait qu’il mentait quelque peu à Silure concernant ses origines, il eut quelques remords, mais après tout, ce n'était pas sa faute.

Silure était chaleureux et accueillant, contrairement à ce que faisaient penser ses vêtements. Mais cela lui donnait une petite touche personnelle, le faisant monter dans l’estime de Veyne.

Peut être était-il un noble maquillé en mendiant ? Fort possible, en tout cas, c’est ce que pensait Veyne. Afin de confirmer ses dires, il lui retourna sa précédente question…

Et vous, mon cher, quels sont vos origines ?

Sans pour autant le dire à haute voix, Veyne appréciait énormément Silure, bien qu’il ne le connaisse à peine. Impatient de l’écouter conter une partie de sa vie, Veyne se mit à l’aise en s’allongeant sur le sol poussiéreux de la ville…

Je restais admiratif devant le détachement total avec lequel il parlait de son passé. C'est typiquement le genre de personne qui ne vit que pour l'instant présent. Certains se tournent vers l'avenir, d'autres vers la passé, comme moi. Je compris que, comme moi, il n'était pas disposé à trop en dire sur sa vie.
Fichtre, comment lui sortir quelque chose de cohérent sans éveiller le moindre soupçon ?
Si effectivement il avait voyagé sur tout le continent, je devais rester prudent à l'extrême.

-Je suis du Sud-Est, vers les mangroves, juste encore à l'est. Ma famille est agricultrice depuis des générations. Jeune, je suis parti avec des rêves pleins la tête, pour finalement atterrir ici, au terme de deux ans de pérégrinations.


Je connaissais bien la région pour y avoir passé plusieurs années, et j'espérais qu'elle n'avait pas trop changé ces cinquante dernières années. Peu probable, mais bon. J'avais effectivement grandi dans cet endroit bourbeux à cultiver des légumes. Je me suis engagé dès que j'ai pu me faire la belle. Frères, oncles, cousins et toute la famille a essayé de m'arrêter. Pas longtemps.

-Il s'est trouvé que je me débrouillais pas mal une arme à la main, je me suis donc engagé dans l'armée.

Je me suis arrêté un instant, cherchant une suite logique à mon histoire. Je m'efforçai de laisser dériver mon regard pour ne pas indiquer que je mentais. Enfin, l'histoire était vraie, je l'avançais juste de deux siècles.

-Et puis, j'ai vu trop d'horreurs, et en ai perpétré encore plus pour pouvoir supporter la guerre.

C'était vrai aussi. J'avais fait des choses dont je n'étais pas fier, tout ça dans l'intérêt du Roi, du royaume, mais au final, des horreurs restent des horreurs, surtout quand elles refusent de vous libérer l'esprit. Certaines nuits d'orage, je revois encore les flammes avalant des dizaines de personnes innocentes, brulées sur mon ordre.
Pourtant, soldat j'étais resté. Jusqu'à la fin.

-Alors je me suis retiré ici, loin et proche du monde à la fois. Et je ne me vois pas retourner dans ma famille quinze ans après.

J'avais plus de deux cent ans, et je racontais ma vie à un gamin d'à peine vingt. Même si mentir ne me plaisait pas vraiment, il y a certains passages de ma vie que je ne pouvais décemment raconter. J'avais eu un fils. Je n'ai jamais su ce qui lui était arrivé après ma transformation.
J'eus un petit rire ironique sur ma pitoyable existence, puis soupirai lamentablement. On pouvait aisément me taxer de faible d'esprit.

-Quant à Joyeuse (Je tapotai lentement le pommeau de mon arme pour lui faire comprendre que c'est ainsi qu'elle se nommait), c'est tout ce qu'il me reste.

Je regardai cet enfant allongé nonchalamment dans la poussière avec un mélange de compassion et d'admiration. Que la vie était simple quand on était jeune...

Joyeuse? Bien étrange appellation pour un objet qui servait principalement à ôter l'âme des plus imprudents. En vue de son allure, elle devait être extrêmement ancienne. On n'en fait plus des lames aussi tranchantes. L'arme héréditaire de sa famille... Sans doute. Ou alors, il l'aurait avec l'argent gagné au service du roi; une possibilité, comme une autre.

Jour après jour, le ciel perdait de son éclat habituel. On sentait tant bien que mal les ténèbres s'emparer du continent, jour après jour. La faute à qui? Sired et son incompétence totale... Veyne le détestait par dessus tout. Et c'est bien pour cela qu'il comptait donner cet objet aux Kvatchiattes...


Ce n'est qu'en repensant à ce personnage détestable que Veyne se souvint de cette nuit si spéciale. La nuit où il découvrit un double fond dans son bouquin, en l'ouvrant, il libéra une aura à la limite divine. Cela ne manqua pas d'attirer l'attention de l'élite impériale, en vue du fait que l'aura en question était liée à l'une des cartes que Sired cherche. Ce n'est que depuis ce jour que Sired recherche sans relâche Veyne, pensant pouvoir lui soutirer des informations à propos du lieu où il trouva la carte, et enfin la lui retirer. Mais la garde impériale ne put suivre le rythme de vie que s'imposait Veyne, il changeait de ville presque tout les jours; c'est ainsi qu'il put survivre assez longtemps pour en arriver là... La capitale, enfin!

Un bruit sourd l'arracha à ses pensées, évoquant le cri robotique d'une machine. D'un simple mouvement, il se releva et se mit en garde, légèrement en retard par rapport à Silure...

Quatre silhouettes apparurent, et le son s’arrêta aussi tôt. Ils portaient la tenue de l’élite impériale, et la grosse machine à leur gauche n’était sûrement pas là que pour décorer. Après avoir balayé la zone, leur regard s’arrêta au niveau de Veyne…

Sinistra Veyne. Vous êtes en état d’arrestation pour haute trahison ainsi que pour complot envers la couronne impériale. Suivez nous jusqu’au château et tout se passera bien pour vous. Résistez et nous nous verrons contraints de casser jusqu’à moindre de vos os et de vous traîner jusqu’au castel.

Haute trahison, complot envers la couronne impériale ? C’est une blague ? Sired devrait être emprisonné pour mensonges dans ce cas là.
Je coulais un regard à ma gauche et vis Silure, prêt à frapper si le besoin s’en présentait. C’est alors que je lui dis discrètement :

Tu ferais mieux de partir, Silure. Ce fut un plaisir de discuter avec toi, mais on ne peut rester ensemble plus longtemps, je suis officiellement classé dans le dossier des terroristes menaçant le Misanris. Si tu décide de rester et de me défendre, ta vie basculera vers une toute autre face.

C’est avec soulagement que je le vis se retirer de l’endroit. Il ne semblait toute fois pas content de me laisser ici, mais il avait compris que sa présence ne changerait rien quant au fait de mon destin. Le bras de la machine –lourdement armé- était pointé sur Veyne depuis leur arrivée. Non mais sérieux, ils comptaient lui faire peur avec cette boîte en conserve ?

Il sortit, dans un premier temps, une paire de gants qu’il ne tarda à enfiler. Il dégaina par la suite Over soul –lentement- de sa main gauche, tandis qu’il saisit Over hit de la main droite. Il s’avança de quelques pas et finit par dire d’un ton impassible :

Bah dis donc, les gars… Z’allez devoir casser de l’os, on dirait.

Au moment même où il prononça ces mots, Veyne eut la conviction qu’ils seront peut être ses derniers. Le globe oculaire de la machine se mit à bouger dans tout les sens, tandis que le canon situé à l’extrémité de son bras semblait ajuster sa cible ; Veyne.
Le tir fut rapide, presque instantané. Des boulets de canon chargés d’explosifs fusèrent dans la direction du jeune garçon…

Veyne ne tarda à effectuer une roulade vers sa gauche, se mettant en sécurité derrière un mûr délabré. Ce même mûr le protégea des éclats de l’explosion, lui permettant alors de tenter une offensive.

Il sortit quelques secondes plus tard du nuage de fumée provoqué par l’explosion. Et, en l’espace d’un instant, il fût devant l’un des gardes, l’invitant alors à valser plusieurs mètres au loin en lui assénant un violent coup au menton à l’aide de sa garde. La riposte ne se fit malheureusement pas attendre, toute la troupe était là ; Taille, estoc, parade, coup diagonal, balais, enchaînement et combos. Veyne tenta tout, mais au final, ses coups se mirent à souffrir de la fatigue…

Alors que l’un des gardes réussit à le désarmer de son épée, ainsi que de son flingue, Veyne se considéra comme mort, avant que la machine ne dégagea ses alliés d’un violent coup d’épaule, quoique vu sa carrure, c’était beaucoup plus un bus qu’une épaule… Quelques instants plus tard, sa voix métallique se fit entendre :

Rappel objectif 666 21. La mission du Squadron d’élite consiste à ramener l’héritier au roi, vivant.

Le ramener vivant ? Ca devenait clair ; ils voulaient la carte, et apparemment c’était gagné. Alors qu’ils s’apprêtaient à immobiliser Veyne, une aura se fit sentir…

En essayant de paraître le plus calme possible, j'agrippai l'épaulière de l'un des soldats. Il se tourna vers moi d'un air ahuri, nos regards se croisèrent tandis que je le dominais de toute ma hauteur.
Sa main décrivit un mouvement vers son arme d'un geste vif; alors je broyai son armure d'une torsion de la main, et le tirai violemment en arrière et le projetai à plusieurs mètres tandis que j'attaquais les trois autres soldats.
Même sans aucun entrainement, tout vampire est avantagé au combat au corps-à-corps.
Ne voulant blesser personne, et tuer encore moins, je laissais Joyeuse dans son fourreau et envoyai mon poing percuter l'abdomen du premier soldat face à moi de façon à le faire décoller du sol.
Sous son uniforme, je sentis l'acier de bonne facture amoindrir le choc, et malgré le souffle coupé, il encaissa l'attaque avec une robustesse à toute épreuve.
Infanterie d'élite, à n'en pas douter.

Je jetais un coup d'œil sur le coté pour m'assurer de la sécurité du criminel que j'aidais. Au prises avec la machine, ses mains bougeaient en cadence sur les éclairs bronzés qui s'en échappaient de temps à autres. Magie du métal.
Le grincement des lames que l'on tire hors des fourreaux se fit entendre et aussitôt je sautais par-dessus le premier des gardes, lui administrant un coup de genou à la tempe, histoire de le sonner plus longtemps.
Prenant appui sur ses épaules, je l'envoyai sur son collègue de droite, qui l'esquiva néanmoins sans peine.
Avant même que je retombe au sol, le vrombissement d'une lame fendant l'air parvint à mes oreilles, avant que l'acier lui-même ne parvienne à mordre ma chair d'un coup de taille.
J'envoyai le soldat valser au loin d'un coup de pied au thorax. Merde, ma blessure était sévère. Avant même que je puisse reprendre mon souffle, les deux autres se précipitèrent sur moi, épées tirées et prêtes à frapper.
Mais ce fut Joyeuse qui frappa la première, perforant acier, chair et os à travers le solide casque métallique du premier.
Toutes griffes dehors, je me jetai sur le deuxième. Son instant d'hésitation à la vue de mes canines allait malheureusement lui couter la vie.
Je déteste vraiment tuer.
Joyeuse décrivit un parfait mouvement circulaire, mais fut parée de justesse dans un éclat d'étincelles colorées. Une libération de force et je le clouai au sol, à deux doigts de briser son arme, quand un coup me perfora l'épaule. Je sentis quelque chose s'abattre sur l'arrière de mon crâne, tandis que le soldat me repoussai d'un coup de pied
Ils continuèrent à marteler mon crâne jusqu'à être sûrs que je serais incapable de me défendre, et je m'effondrai dans un grognement mauvais.

Ma tête heurta le sol, dans un bruit que je n'entendis même pas. Malgré le flou qui remplissait ma vision du monde, je vis l'adolescent Sinistra sur un tas de décombres, titubant, son arme à la main. Son flanc gauche saignait abondamment, et il boitait, mais il était victorieux.
Jusqu'à ce qu'ils le plaquent au sol, du moins, et lui fassent subir le même sort que moi.

-Vous êtes en état d'arrestation pour complicité de haute trahison et complot envers la couronne, de tentative d'aide à un criminel de premier rang, et de pacte avec les puissances obscures, vampirisme. Pour ce dernier crime, vous périrez sur sur le bûcher.

Ce fut mot pour mot ce que j'entendis dire. Bien évidemment, je connaissais le sentence que l'on réservait aux vampires. Il n'y avait nul besoin de me la rappeler.
Je sentais mon esprit dériva vers l'inconscience, alors qu'on me trainait par les pieds, vers le château, probablement. A moins qu'on ne décide de faire un feu de joie avec mon corps immédiatement...
Hmmm, réjouissant...

Sujet clos.

Enfin, j'ai un peu tardé je m'en excuse Kyp x'). Bref, on va attendre les instructions de Magic pour la suite, mais je pense que l'event commencera d'ici après demain. On fera peut être un petit RP dans le cachot, puis après, ce sera l'exécution en publique au beau milieu de la Grande Place :'p